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Extrait de la Thèse de Maîtrise de Sociologie Rurale

" Déclin d'une commune française - Cunfin en Champagne "

 

de Monsieur Claude PARIS

Dans sa thèse de maîtrise de sociologie rurale " Déclin d'une commune française - Cunfin en Champagne " réalisée sous la direction de Mesdames EIZNER et GROSHENS (Université PARIS X - NANTERRE - Sciences sociales et administration - Année 1985/1986),

Monsieur PARIS, Claude, détaille une approche historique de Cunfin, dans laquelle y est relaté ;

 

LE PRIEURÉ

*.*.*.*.*......     Si nous en croyons quelque chroniqueur, le prieuré de Cunfin ainsi que celui de Laferté-sur-Aube, aurait été fondé vers l'an 890 par un des chanoines de Saint-Martin de Tours qui, pour éviter la fureur de normands, se réfugia, en 867, avec ses frères, au diocèse de Langres dans le monastère de Saint Loup à Chablis près de Tonnerre où ils restèrent jusqu'en 888. Il n'est malheureusement pas facile de faire remonter l'existence de ce prieuré à cette date, par manque de preuves. Cependant, il peut se faire que les premiers fondements en aient été jetés et que l'ouvrage ait été interrompu.

Il apparaît plus vraisemblable que Cunfin ne soit devenu le siège d'un prieuré que deux siècles plus tard, en l'année 1076, suivant le "Chronicon Lingonense", dont l'auteur en attribue la fondation à Simon de Valois, comte de Bar-sur-Aube (1). Sa création fut approuvée par l'évêque de Langres, Reynard de Bar, surnommé Hugues et qui appartenait à la maison des comtes de Bar-sur-Seine. Les biens qui devaient assurer à ce nouvel établissement les ressources nécessaires, étaient des bois, des terres et des prés situés en partie sur le finage de Cunfin.

Les prieurés qui étaient de petites abbayes, ne furent en fait que des colonies de religieux qui, suppléant au petit nombre des prêtres séculiers, d'ailleurs très ignorants, venaient administrer les paroisses avoisinantes. A chaque prieuré étaient attachées une ou plusieurs fermes dont les revenus appartenaient aux religieux qui l'habitaient.

Le prieuré reçut quelques propriété d'un chevalier de Cunfin dont on ignore le nom. Cette transaction s'effectua en 1222, en présence de Hugues, archidiacre de Langres. Le prieuré était sous le titre de Saint-Maurice suivant ce qu'on lit dans quelques chartes où il est appelé "monastérioum sancti mauricii". Il était de l'ordre de Saint Benoît et relevait des bénédictins de l'Abbaye de Saint-Claude en Franche-Comté, appelée autrefois Saint-Eugende du Mont Jou dit Mon Jura. Simon de Valois l'avait mis sous la dépendance de cette abbaye lorsqu'il y embrassa la vie religieuse en 1077.

Le prieur était à la nomination de l'abbé de Saint-Claude et l'évêque de Langres avait le droit de visite dans ce lieu. Cette maison était habitée primitivement par une dizaine de moines "qui y goûtaient le service de Dieu, le repos, la paix et le bonheur qu'ils n'avaient pu trouver au milieu du monde ; tous servaient Dieu avec une grande ferveur dans la prière, le jeûne et les veillées (2)". Ce couvent eut pour prieur (3), vers 1144, un parent d'Adeline, nièce de Saint Bernard, abbesse de Poulangy.

  Durant les XIIème, XIIIème et XIVème siècles, les moines furent souvent  obligés d'abandonner leur couvent plusieurs fois saccagé et dévasté par les gens de guerre. Plus tard, les calvinistes disperseront ou brûleront les reliques dont les religieux avaient enrichi l'église (4).

Ce prieuré sera habité par des religieux jusqu'au temps de la Réforme et on y comptera encore sept personnes au commencement du XVème siècle. Mais à partir de 1560 ce sont des fermiers qui reprendront la succession.

Le prieur prit alors la qualité de curé primitif de Cunfin, car lors de la fondation du prieuré, il n'y avait pas encore de curé en titre. Les premiers séculiers chargés de desservir les églises, n'étaient que des délégués temporaires de l'évêque qui les chargeait ou les révoquait à volonté.

Le prieuré était un titre dans l'église paroissiale et le prieur payait chaque année, à la Pentecôte, au chapitre royal de Saint-Claude, la redevance de 52 sous tournois dus sur ses revenus.

Après l'érection de l'Abbaye de Saint-Claude en évêché, en 1742, le prieuré sera donné en bénéfice ou en commande, c'est à dire que le Roi donnait titre à un ecclésiastique séculier pour posséder le prieuré avec permission de disposer de revenus pendant sa vie en jouissance perpétuelle et sans rendre compte à personne. Toutefois le prieur (5) commanditaire ne pouvait aliéner les immeubles. Il devait acquitter les charges et faire les réparations.

Géographiquement, ce prieuré était bâti dans le clos au sud de l'église paroissiale qui servait ainsi de chapelle aux moines qui y allaient célébrer leurs offices. "Le principal corps de logis était accompagné de tourelles flanquées aux angles de l'enceinte. Le jardin était au levant et derrière les bâtiments, les granges et les écuries étaient au midi. La cour avait son entrée sur la rue en face du presbytère".

Ce local qui avait vu tant de générations, sera démoli en 1772 pour être transféré à une ou deux "portées de fusil" du pays. Le nouveau prieuré sera reconstruit avec les fonds provenant du quart en réserve des bois qui lui appartenaient. Cette bâtisse et tous les biens qui en dépendent seront vendus à bas prix comme biens nationaux en 1790 et un habitant de Cunfin s'en rendra acquéreur. La déclaration des biens et revenus de ce prieuré faite en 1788 porte qu'y étaient attachés, 477 arpents de bois, dont 119 en réserve, et le surplus divisé en 25 coupes complétées par 26 arpents, 1 quartier, 6 cordes de bonne terre et 60 cordes de près (6).

En 1380, eut lieu au parlement, un nouvel accord entre les deux abbayes. "Il fut reconnu que Clairvaux jouirait des émoluments, exploits pour un quart, que cette abbaye aurait un maïeur exerçant son office conformément à d'anciennes lettres qui en avaient déterminé l'exercice et que le prieur de Cunfin aurait aussi son maïeur et les trois quarts des dits revenus...".     ......*.*.*.*.*

(1) - Simon, fils de Radulphe, comte de Crépy, et d'Adèle, comtesse de Bar-sur-Aube, était un des plus grands et des plus riches seigneurs de France. Outre le comté de Bar-sur-Aube qu'il possédait, il était comte de Crépy, de Valois et de Mantes. Son père avait été excommunié pour avoir répudié sa femme légitime et en avoir épousé une autre. En 1076, Simon de Valois fonda douze prieurés (Laferté, Silvarouves, Latrecey, Lanty...) auxquels il donna plusieurs terres et domaines qui faisaient partie du comté de Bar-sur-Aube, et pour assurer les fondations, il les fit sceller du sceau de Reynard de Bar (évêque de Langres). Sur la fin de sa vie, il se retira dans un monastère après avoir vécu quelques temps dans la solitude des forêts. Il fut envoyé à Rome où il mourut en 1080 (ou 1082 ?). On l'enterra dans l'église de Saint Pierre de Rome et une partie de ses reliques furent ramenées dans le diocèse de Besançon.

(2) - Abbé Tynturié : Notice historique sur le Bourg de Cunfin.

(3) - Voir la liste des prieurs qui se sont succédés.

(4) - Décade historique du diocèse de Langres (J.Vignier).

(5) - dernier prieur : Louis Joseph de la Fargue de Bellegarde, vicaire général de Châlons-sur-Marne.

(6) - En 1728, ce prieuré possédait 40 journaux de terres labourables et 5 arpents de près. Il payait alors, à l'Abbaye de Pothieres une redevance annuelle de 7 septiers d'avoine, évaluée à 28 livres et 16 sous. Les derniers revenus se chiffraient annuellement à la somme de 3000 francs (800 livres en 1641).

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